Enquêtes d'Hermès 5 - Les secrets de Poséidon by Richard Normandon

Auteur:Richard Normandon [Normandon, Richard]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

À l’aube, en effet, Hermès constata que le fil s’était légèrement détendu et qu’il n’y restait plus aucune étamine. Sur l’avant-dernière étagère, presque au niveau du plafond, un emplacement était vide entre deux flacons noirs.

– Le kaikas ! s’exclama Éole quand Hermès l’eut autorisé à le rejoindre. Tu vois bien que, chaque nuit, le voleur va un peu plus loin, qu’il s’intéresse à des vents de plus en plus dangereux.

– Qu’a-t-il de particulier, ce kaikas ?

– Il attire à lui au lieu de repousser. Ce serait une arme parfaite pour déstabiliser un adversaire, le précipiter vers l’épée qu’on brandit vers lui. À moins qu’on ne l’utilise pour dérober un objet solidement gardé : un trésor inestimable, le trident de Poséidon, un éclair de Zeus.

– Mais pourquoi le voleur aurait-il attendu si longtemps avant de s’en emparer ? Pourquoi ne pas l’avoir pris il y a trois jours ?

Éole exhala une longue brise, alanguie comme un soupir.

– Oui, tu as raison. C’est à n’y rien comprendre.

– À quoi ressemble la fiole ?

– Elle a la forme d’un sablier et, comme toutes celles de la même rangée, je l’ai faite en cristal noir, parfaitement opaque pour en préserver le contenu.

– Aucune inscription sur sa surface ? Aucune étiquette ?

– Hermès, j’ai assez bonne mémoire pour me souvenir de tous mes vents, même s’ils sont des milliers.

Hermès n’osait formuler à voix haute la déduction qui s’imposait. Une seule personne aurait été capable de connaître assez bien le laboratoire pour savoir quel flacon renfermait le kaikas – mais il avait peur d’accabler Éole davantage s’il mentionnait le nom de sa fidèle amie et, surtout, il manquait de preuves pour l’accuser.

Du bruit s’élevait derrière eux dans les couloirs : les vents s’étaient éveillés, grignotaient sans doute en cuisine quelques graines soufflées avant de partir travailler. Hermès s’empressa de les rejoindre pour les accompagner au-dehors. Notos semblait plus fatigué que son frère.

– Pourquoi ces cernes ? lui demanda Hermès d’un air malicieux. Les fous rires d’hier t’auraient-ils empêché de t’endormir ?

Notos ébouriffa ses cheveux d’un geste vif, comme pour se donner de la vigueur.

– Oh, je crois juste que l’odeur de tes fraises ne m’a pas réussi. Les vents sont ainsi faits qu’il en faut peu pour perturber notre légèreté et l’équilibre de notre constitution.

– Je n’aurais pas dû te tenter, se désola Hermès.

Quand ils sortirent de la grotte, le soleil commençait à se lever, mais Hermès ne vit aucun éclat de coquelicot blanc sur les deux frères. Il les regarda enrouler leurs ailes sur eux-mêmes et disparaître vers le nord de l’île.

– Allons, fit Éole dans son dos, tu vois bien que ce sont de bons garçons. Comment pourrait-on les soupçonner ?

Hermès se retourna et eut bien du mal à retenir une exclamation : des paillettes étincelaient sur les épaules rondes d’Éole – cinq étamines d’un blanc éblouissant qu’Éole épousseta du revers de la main comme de vulgaires pellicules.

La surprise fut telle qu’Hermès faillit en perdre ses moyens. Bredouillant quelques mots d’excuse et prétextant un

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